LE CORPS EN CRISE DANS LA PRATIQUE PSYCHANALYTIQUE ET MÉDICALE
COLLOQUE INTERNATIONAL
De l’anorexie mentale au body building : le corps masculin en question
Dr Jean Chambry, pédopsychiatre
Fondation Vallée, 7 rue Bensérade 94250 Gentilly
Dans la société occidentale, nombre de femmes souffrent de conflit avec leur corps, corps qu’elles ressentent comme trop éloignés des idéaux culturels. Ces conflits sont les supports de troubles du comportement alimentaire (anorexie mentale et boulimie particulièrement.) Cependant, les femmes n’ont pas l’exclusivité de ces troubles même s’ils sont effectivement moins fréquents selon les études épidémiologiques, chez les hommes. Il existe moins de travaux chez les garçons. Sur le plan narcissique, il semblerait que la fragilité identitaire soit plus grande, ce qui a fait penser que l’anorexie mentale masculine était plus fréquemment un équivalent psychotique. Au niveau œdipien, les identifications sexuées apparaissent plus complexes. Il existerait en effet chez ces garçons, des difficultés d’identification masculine importante et à une crainte du féminin en eux même.
La psychopathologie rencontrée chez ces garçons nous a permis d’interroger les mécanismes à la puberté qui soutiennent la constitution de l’identité sexuée. Le corps est alors engagé au service de la représentation de soi. Comment le corps devient-il le support de l’identité, comment la confrontation à la différence des sexes rencontre les interrogations narcissiques de l’adolescence ?
Les études sociologiques ont montré les modifications importantes concernant les idéaux culturels occidentaux du corps masculin qui se doit d’être musclé. Les hommes tout comme les femmes souffrent de ne pas être satisfait de leur corps même s’ils l’expriment moins facilement. Malgré tout, le pourcentage de troubles du comportement alimentaire selon les classifications internationales est majoritairement féminin. Existeraient-ils d’autres expressions de ces conflits chez les hommes ? L’observation d’hommes pratiquant le body building a mis en évidence un concept, nommé bigorexia ou muscle dysmorphia doit il être rapproché de la symptomatologie anorexique.
Ainsi l’anorexie mentale du garçon vient nous révéler que certains hommes utilisent leur corps comme support de leur identité sexuée. La fragilité identitaire ainsi révélée doit être masquée par un corps qui renvoie une image de soi supportable qui vient réparer le vide de la construction psychique, le défaut de symbolique.
Photo prise par Loris Poidvin