top of page

SAUVONS LES CORPS

 

L’humiliation comme peine de mort : la honte de vivre dans le milieu médical.

 

Marina Kousouri, psychologue clinicienne, psychanalyste, Docteur en Psychanalyse de l'Université Paris Diderot.

 

 

L’objet de cette présentation est de montrer que, dans le monde capitaliste et, plus encore, dans un contexte de crise qui légitime certaines pratiques et qui revient sur les fondements mêmes de l’humanité, l’humiliation de l’homme par l’homme s’assimile à une nouvelle forme de « peine de mort ». Cette peine de mort que le sujet s’inflige à lui-même, c’est la honte de vivre ou, plutôt, la honte d’avoir un corps vivant. Le corps redevient en effet l’enjeu principal du sujet : une cassure narcissique se produit de façon si profonde que le sujet, auteur d’une faute imaginaire, destitue son propre corps. L’atteinte à la dignité est telle que le sujet voudrait ne plus exister et faire disparaître son propre corps.

 

L’évolution du monde capitaliste est particulièrement propice à une telle destitution : en effet, la dévalorisation d’un sujet dont le travail est parfaitement remplaçable, mais surtout la dissolution du lien social propre au monde capitaliste, favorise la crise du moi et de l’idéal chez les sujets.

 

Un exemple paroxystique en est fourni par l’évolution du système médical en Grèce dans un contexte de crise économique qui, loin de remettre en cause les ressorts du capitalisme, les pousse à leur extrémité. Stigmatisation des prostituées séropositives, banques du sang réservées aux Grecs et, plus généralement, conditions de soin des malades dans les hôpitaux publics : tous ces éléments sont un symptôme dans le social du fait que la crise introduit une nouvelle forme de peine de mort par l’humiliation.

 

Les patients, déshumanisés, n’ont d’autre choix pour préserver leur qualité de sujet, que de ressentir cette « honte de vivre ». L’humiliation est devenue peine de mort. Face à cette crise, la seule révolte dont le sujet est capable est la révolte du corps : la honte de vivre, le renoncement physique, le suicide. C’est la dernière preuve, bien que mortifère, de l’existence du sujet.

bottom of page