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The second mouth

 

Carole Niquet, étudiante en psychanalyse à l'Université Paris Diderot, psychologue stagiaire à l'hôpital Sainte Anne.

 

Toute l'oeuvre de ORLAN, artiste plasticienne française, questionne le corps dans la société. Pour cela, elle travaille sur le sien à l'aide des nouveaux outils que lui apportent la science, la technique, l'informatique et la biologie. Son travail sur la représentation est incarné puisqu'elle modifie son corps à l'aide de nombreuses opérations chirurgicales, de prélèvements de substances corporelles dans une quête d'identité qui fluctue au fur et à mesure des transformations visuelles. Car l'identité n'est sans doute pas pour elle, dans cette apparence corporelle qui se modifie sans cesse. 


Selon ORLAN, le corps est le dernier espace de liberté ce qui nous fait irrémédiablement penser en miroir au biopouvoir foucaldien et la volonté de contrôle des corps. Mais ORLAN est une femme libre qui s'affranchit des cadres esthétiques, comme le diktat de ce à quoi doit ressembler une femme, et remet en question la notion de beau, s'opposant ainsi à la célèbre formule kantienne "ce qui est beau plaît universellement sans concept" (Critique de la faculté de juger). Il faut avoir conscience du cadre pour pouvoir le dépasser et en sortir. 

Il ne s'agit aucunement de Body Art pour lequel certains artistes recherchent la douleur corporelle afin de l'explorer avec flagellations et mortifications, même si le spectateur est témoin d'un corps ouvert, flagellé et troué, mais avant tout, modifié. ORLAN poursuit essentiellement une recherche esthétique, philosophique et psychanalytique sur ce qu'est le corps et l'image du corps. D'ailleurs, avant chaque opération chirurgicale, elle lit un passage de La Robe d’Eugénie Lemoine Luccioni, psychanalyste et élève de Lacan, dans lequel l’auteur écrit que « la peau est décevante car elle ne reflète pas ce que nous sommes ».

 

On se souviendra particulièrement de son oeuvre filmée et photographiée,The Second Mouth (Seventh surgery), Omnipresence, (21 novembre 1993), pour laquelle elle se fait ouvrir une seconde bouche sans anesthésie générale, alors qu'elle parle sur la table d'opération. Dans cette oeuvre, elle questionne une fois de plus le féminin par le traitement qu'elle fait de la femme qui possède des bouches, marques du manque. Puisqu'elle n'a pas le phallus, autant montrer cette absence par de multiples bouches et trous dans le corps, à moins qu'il ne s'agisse de l'incarner par le biais des opérations répétées.

 

 

 

 

http://www.orlan.eu/

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